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MILOUD KERZAZI nous explique sa motivation à mettre en photos la Sous-France

Interview de MILOUD KERZAZI qui nous explique sa motivation à mettre en photos la Sous-France

Interview de MILOUD KERZAZI qui nous explique sa motivation à mettre en photos la Sous-France

Peux tu te présenter :
MILOUD KERZAZI : Je me prénomme Miloud KERZAZI, père de 5 enfants, animateur socio-culturel de profession, photographe social de passion.
J’ai 44 ans, je suis né en France, j’ai grandi dans les quartiers populaires de ma ville à Châtellerault, une ville dans le grand Ouest de la France.
Grandir dans un quartier populaire c’est grandir dans un malaise social très grand avec des sentiments d’injustices croissant, des disparités de plus en plus fortes, dans un monde en voie de paupérisation sur le point de basculer vers une misère évidente …
Grandir dans un quartier populaire, c’est être plus pauvre que la moyenne des Français. C’est être plus mal logé, faire l’objet de plus de discrimination, avoir un accès restreint aux bonnes écoles. C’est se voir refuser l’accès à des pans entiers du marché du travail… La liste des stigmates est longue.
Quartier populaire : souvent étiqueté « Zone d’Éducation Prioritaire » qualifié de « sensible » et comme ça ne suffit pas on y rajoute de la « prévention violence » !
ZUS, ZEP , ZAC, ZEP, ZFU , ZUP … des Acronymes complexes qui n’ont plus aucun sens :
Moins on comprend, mieux c’est , car l’essentiel est de masquer le désarroi social des quartiers populaires.
Quoi qu’on en dise, la sous France et l’humiliation ne sont jamais un bon terreau pour la Démocratie !
Essayer de grandir dans un monde où tout semble inenvisageable ou pour finir on vous suggère que c’est de votre faute et qu’il ne faut surtout pas le dénoncer sinon vous faites de la victimisation !
Il faut avoir les épaules très large pour porter ce sac à dos et grandir avec un « sentiment d’injustice », sentiment qui m’a conduit à me construire et à développer une  « culture de résistance ».

Comment es tu tombé dans la photo ?
MILOUD KERZAZI : Lorsque j’étais plus jeune, mes grands frères avaient déjà un bon coup de crayon que j’ai sûrement hérité d’eux. L’un d’eux était passionné de photo à une époque où c’était de l’argentique, j’ai suivi son chemin aujourd’hui avec le numérique.
Durant l’adolescence j’ai fais un atelier photo avec l’animateur du quartier et j’ai observé le mélange des produits chimique dans une chambre noire … et pu développer mes 1éres photos : c’était vraiment magique !
J’ai du laisser de côté la photographie à cause du coût des produits et des appareils et des tirages.
La révolution du numérique a tout bouleversé … plus besoin de chimie !
J’ai débuté avec un bridge le Konica Minolta DiMAGE Z1 avant de pouvoir m’acquérir le 1er reflex Canon 300 D à un très bon prix et j’ai pu découvrir les plaisirs d’un reflex numérique.( c’est d’ailleurs l’animateur de l’atelier photo qui me l’a vendu )
Du reflex je fut séduit par le Fuji X100 un compact avec son look vintage que j’ai gardé 2 ans.
La photographie est une passion qui coûte très chère, n’ayant pas les moyens nécessaires d’acquérir l’appareil et les objectifs pour mon amour de la photo, j’ai du me résigner et j’ai fini avec aujourd’hui avec un hybride l’Olympus OMD – E5 .

Miloud Kerzazi

Qu’est ce qui t’a fait prendre le parti de photographier la réalité de la rue?
MILOUD KERZAZI : Tout simplement parce que c’est mon vécu, que je le côtoie encore et surtout parce qu’il est temps que la Banlieue  se raconte par ceux qui la vivent, sans attendre que d’autres la fantasment.
Chacun de nous est concerné par tous les problèmes sociaux et son environnement.
La fonction de la photographie sociale est éminemment civique et citoyenne, elle se définit par son utilité à témoigner de sujets que l’on n’aurait pas du voir.
J’ai du taire certaines choses étant plus jeune, ces injustices rejaillissent aujourd’hui.
Enfant, j’ai toujours été confronté au regard de l’autre, aujourd’hui rien ne change, toujours les mêmes regards. Enfant, le racisme anti arabe m’a profondément blessé, aujourd’hui rien ne change ce racisme est remplacé par l’islamophobie.
Vous n’avez pas idée de l’abîme émotionnelle qu’une stigmatisation créé dans le sol de l’inconscient .
Je ne sais pas si les gens imaginent vraiment se que l’on ressent lorsque l’on est considéré comme un étranger dans son propre pays.
J’ai donc l’occasion de pouvoir réagir et de m’indigner !

« Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux. Quand quelque chose vous indigne, comme j’ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint le courant de l’histoire et le grand courant de l’histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Indignez-vous ! » Stéphane Hessel

Que veux tu faire passer comme message dans tes photos ?
MILOUD KERZAZI : Je l’ai déjà évoqué, avant tout dénoncer certaines injustices mais aussi parce que je m’aperçois de jour en jour  l’ampleur des dégâts, du sentiment de peur à l’égard de l’autre ( le migrant, le rom, le manouche, le musulman, l’habitant du quartier, l’arabe, le noir …) avec comme lourde conséquence un repli sur soi.
Mon message est également un travail sur le V du vivre ensemble, un combat qui se joue tous les jours …
C’est l’horizon de la France qui est en jeu et l’avenir de nos enfants, pour cela c’est avant tout une volonté commune. Chez soi, au travail, à travers mon blog, ici et là. A chacun de porter ses responsabilités quant au message véhiculé à l’encontre de l’autre.
Ils nous reste une seule perspective :
Nos enfants, les jeunes doivent dès leur plus jeune âge être éduqués chez eux, en classe, dans les centres de loisirs – à plusieurs choses : Discuter ensemble de leurs convictions, de leurs croyances, cultures, traditions, dans un climat d’ouverture d’esprit et d’écoute en vue de développer leur curiosité pour l’autre, de comprendre ce qui distingue les cultures, les visions du monde : pour comprendre que chacun n’est rien sans l’autre …
À notre échelle , dans un monde qui est bouleversé : Que faisons nous pour répandre la Paix ?
Posons au moins la question

Peux tu nous expliquer ta phrase  » Nous sommes tels des livres. Jugés sur la couverture, au mieux d’après un résumé, au pire ! « 
MILOUD KERZAZI : C’est une métaphore qui veut dire que « Nous sommes tels des livres, jugés sur la couverture » : Je fais partie d’un vécu, d’une histoire dans un quartier de France parmi tant d’autres, je porte une barbe, j’ai un patronyme arabe et un faciès différent. A travers ces préjugés et les amalgames qui ont porté jugement sur moi . « au mieux d’après un résumé » : certaines presses et certains médias résument mon vécu à travers la stigmatisation sous 3 angles : immigration, insécurité et islam.
« au pire selon les critiques. » Le fruit de tous ses préjugés, ses stigmatisations sont les critiques que font des intellectuels faussaires, des vautours politiques qui profitent de chaque attentat pour vomir sur les musulmans, des intégristes laïcards qui prennent en otage la Laïcité, de la fausse dissidence qui parle au nom des autres, de l’imam autoproclamé qui charcute la langue de Molière et de ses acolytes, de la sériale menteuse Fourest et toute cette “armée de division massive” qui surfe sur l’ambiguïté, l’amalgame et le rejet de l’autre !
Pour finir  » Mais au fond qui a lu l’histoire ? »  Qui connaît réellement mon histoire pour me juger ?

Est ce que tu rencontres des difficultés au moment de tes prises photos ?
MILOUD KERZAZI : Je ne rencontre aucune difficulté dans la mesure où je connais les personnes que je croise lorsque je fais des clichés et mais même dans les autres villes, j’échange un peu et j’explique mon travail photographique auprès des anonymes ainsi que le message que je véhicule à travers mon blog SOUS-FRANCE.FR, généralement, ils acceptent !

Comment réagissent les personnes quand elles se voient en photo ?
MILOUD KERZAZI : Ils sont ravis, de plus dès lors que j’en ai la possibilité, je fais des tirages des photographies et je les offre. Dernièrement j’ai offert une photo que j’ai prise d’un ancien ami (à mon frère) avec sa maman et son chien et lorsque j’ai vu le sourire sur son visage et l’émotion qu’il a eu, j’étais heureux .
C’est un réel plaisir de partage, je photographie sans tricher et si j’ai une prétention que ce soit de l’avoir fait par amour .

Comment choisis tu les différents sujets que tu vas traiter ?
MILOUD KERZAZI : Généralement je choisi les sujets que je vais traiter suite à l’actualité, j’essaye de réagir à travers la photographie avant tout !
Je n’ai pas de rédacteur, je n’ai personne, je suis seul, cela demande énormément de temps comme toute passion.

Un mot sur la photo de l’enfant syrien sur la plage?
MILOUD KERZAZI : Tout comme il y a des mots qui sont indescriptibles, il y a des photos qui sont indescriptibles … Je n’ai pas les mots pour décrire ce drame : Paix à son âme !

Est ce qu’à un moment tu penses qu’il faudrait réfléchir avant de prendre et publier une telle photo ?
MILOUD KERZAZI : Certainement, il faut de la réflexion à savoir quelles en seront les interprétations ?
Les bonnes réactions mais aussi les répercussions dues aux mauvaises interprétations ?
Malgré tout en tant que photographe, je suis profondément attaché à la notion de liberté, que ce soit la liberté de la presse, d’expression, de circuler donc au nom de cette liberté j’exprime librement mes opinions, ma  liberté d’expression, philosophique et artistique.
La photographie n’est pas un crime : Je résumerai par une punchline de BRAV dont le dernier album s’intitule #SousFrance :

« un artiste qui ne dérange pas est un artiste inutile »

Peux tu nous parler de ton livre « « Au cœur d’un Quartier populaire …  » Comment t’es venu l’idée ?
MILOUD KERZAZI : Je reprends les grandes lignes du projet :
J’ai réalisé plusieurs photographies sociales au cœur de certains quartiers populaires et me suis tourné vers ce qui fait sa richesse : ses habitants.
Ne pas les ignorer, ne pas les mettre tous dans le même panier, mais les observer, les prendre en compte, leur prêter attention, une façon d’exister
La réalisation d’un livre photo sera l’aboutissement de ce travail !
Pour cela  je dois :

  • – Choisir le titre
  • – Budgétiser la réalisation technique et matérielle de l’ouvrage.
  • – Sélectionner les photographies, leurs nombres, les formats.
  • – Associer quelques « Plumes » pour accompagner les photographies (certaines personnes connues ou non sont déjà prête à participer )

Sauf que pour le moment je ne sais pas encore le budget que cela représente.
La partie est difficile pour un photographe débutant dans ce domaine, coup de fabrication et tirage élevé, distribution coûteuse, un secteur éditorial très à part et très fermé !
C’est un projet qui n’est pas encore ficelé. Je suis vraiment tout seul. Je le répète et mon travail autour de mon blog me prends effectivement du temps.
Donc faute de temps, ce projet est en stand by …

Tu alimentes souvent ton blog (http://sous-france.tumblr.com/)…est ce que l’actualité est une vraie source d’inspiration ?
MILOUD KERZAZI : Tout à fait … j’essaye d’être à la page dès que possible à travers un coup de gueule, une opinion, une réaction sans me détourner de l’âme de mon blog  : L’art via la photographie et la Révolte

Quelque chose à rajouter ?
MILOUD KERZAZI : J’adresse mes encouragements à la jeunesse des quartiers populaires
Vous êtes la fierté de vos parents, vous êtes la France et la force de demain !
N’oubliez jamais, les moyens le plus sûr d’accéder à une réussite économique et sociale, à des postes clés dans la société, ce sont les études pour ceux qui en ont la possibilité !

“ j’appelle au Jihad social, pour contrecarrer l’illettrisme ” Médine

#SpeakCorner

Que la Paix soit sur vous .
Miloud Kerzazi

Crédits photos : Miloud Kerzazi (http://sous-france.tumblr.com/)

Page FB : https://www.facebook.com/Sous-France-253301784817287/

Blog : http://sous-france.tumblr.com/

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