Jeanne-Marie Laurent réalisatrice du doc Petites Chroniques Urbaines (Interview)

Jeanne-Marie Laurent réalisatrice du doc Petites Chroniques Urbaines (Interview)

Peux-tu te présenter…ce que tu fais dans la vie

JEANNE-MARIE LAURENT : Je m’appelle Jeanne-Marie, j’ai 23 ans et dans la vie, je travaille dans la production audiovisuelle (pour situer un peu, la production est tout ce qui se rattache à la gestion de projets, l’organisation, le financement, …). En ce moment, je suis assistante chez LB, une société qui produit des longs métrages. C’est vraiment un métier que j’ai choisi par passion. Mon objectif professionnel n’était pas du tout de devenir réalisatrice, même si ça m’attirait énormément … Ce sont les rencontres de la vie et mon travail de photographe qui m’y ont amenée !

Comment t’es venue cette idée de documentaire ?

JEANNE-MARIE LAURENT : En avril 2013, j’ai rencontré Nordine Kotbi, ancien monteur de squats dans le 19ème arrondissement de Paris (La Manufacture rue de l’Ourcq notamment). On a très rapidement accroché, et on a vite parlé de street art, de vidéo et de l’idée de bosser ensemble. Depuis mon arrivée à Paris en 2009, j’étais déjà très intriguée et fascinée par le street art. Je m’y suis intéressée mais vraiment de loin, en prenant des photos surtout. J’avais beaucoup d’idées reçues sur ce milieu, Nordine m’a énormément appris sur la culture urbaine, qui n’était pas du tout la mienne, et m’a aidé à écrire le premier jet de mon scénario de documentaire « Petites Chroniques Urbaines ». C’est d’ailleurs lui qui m’a soufflé ce titre 😉

En quoi consiste « Petites chroniques urbaines » ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Petites Chroniques Urbaines sera un documentaire de 52 minutes sur le street art français qui se proposera de dresser un « état des lieux » de ce milieu artistique aujourd’hui en 2014. C’est une réflexion sur les évolutions du graffiti vers le street art. L’idée est en partie née du constat que les documentaires de ce format sur le sujet sont très rares voire inexistants, alors qu’il y a tellement à raconter.

Et c’est également une galerie de portraits d’artistes de street art et de graffiti. Ces portraits permettent de découvrir les artistes dans une intimité différente de celle du documentaire. Dans ces vidéos, on revient sur le parcours et l’univers unique chacun, à travers une interview et la réalisation d’une œuvre dans la rue. Un site internet a été entièrement créé afin de diffuser ces portraits : www.petiteschroniquesurbaines.com.

1er doc sur le street art ?

JEANNE-MARIE LAURENT : C’est mon premier film documentaire oui. C’est même mon premier film tout court 😉

Un pied déjà dans le street art ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Haha, alors pas du tout … A l’origine, je viens de la campagne picarde, je ne suis arrivée à Paris qu’en 2009, à 18 ans, pour mes études. La culture urbaine m’était totalement inconnue jusqu’à cette date, et encore plus la culture graffiti. J’ai appris du street art et du graffiti en commençant à écrire mon documentaire, en effectuant des recherches sur le net, mais ce sont surtout les nombreuses rencontres avec des artistes de ce milieu qui m’ont fait comprendre dans quoi je débarquais !

Quels sont les typologies de personne qui travaillent sur le projet ?

JEANNE-MARIE LAURENT : L’équipe est constituée de jeunes professionnels, nous avons tous entre 21 et 40 ans. N’ayant pas de moyens financiers pour rémunérer une équipe, j’ai recherché des personnes qui accepteraient le fait de ne pas être payé. Et ce sont surtout de jeunes qui m’ont répondu, certains encore étudiants et d’autres en début de carrière. Dans l’équipe, le deal a été accepté mais chacun donne le meilleur de soi-même pour un travail professionnel. Nous savons que nous avons tous à y gagner dans cette aventure, parce qu’elle nous apprend énormément et que l’expérience est fortement positive pour toutes celles qui suivront. Je travaille maintenant avec 10 personnes, et ce n’est que du bonheur, j’ai vraiment une équipe formidable !!! Sans elle, je ne sais pas si j’aurai tenu le coup jusqu’ici ! Un big up à Dorian, mon cadreur, Victor, mon ingénieur du son, à Stéphanie, ma monteuse, à Didier, mon étalonneur, à Hugo, mon compositeur, à Lucas, mon mixeur et à Gabriel, Yoann, Sophie et Raphaël !!

Combien d’artistes et quels sont les artistes qui vont être dans le documentaire ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Si on parle du documentaire à proprement parler, je ne sais pas encore.

Pour ce qui est des Chroniques, nous avons déjà en boite les artistes suivants : MAMBO, MADEMOISELLE MAURICE (qui est le prochain portrait que l’on va sortir d’ailleurs), JBC, FKLD, DJALOUZ, LOR-K et GREGOS. Pour les prochains, il est prévu que nous allions à la rencontre de CHROMERS, MISTER PEE, SKIO, et d’autres qui sont à confirmer 😉

Comment ont-ils été choisis ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Je connaissais le travail de quelques artistes, de par mes nombreuses balades dans le 18ème arrondissement de Paris. Ensuite ce sont mes recherches qui m’ont amenée à mes premières rencontres. Mais le street art est au même titre que d’autres sphères artistiques un tout petit milieu. Les 5 premiers artistes que j’ai rencontrés m’ont donné chacun une dizaine de noms d’autres artistes et de fil en aiguille, c’est allé très vite. Mon premier critère de choix est avant tout humain … Il faut que le courant passe et ce, dans les deux sens. Ensuite, je m’intéresse à la démarche et aux choix de l’artiste, à ce qu’ils ont à dire sur le travail et leur réflexion artistique. Je ne fais pas ces portraits pour exprimer mes propres goûts artistiques mais pour proposer une rencontre entre un public et un artiste.

Quelle est la ligne directrice pour chaque artiste ?

JEANNE-MARIE LAURENT : La base de chaque portrait est l’interview. La plupart de mes questions est récurrente. J’adapte ensuite ce premier canevas en fonction de l’univers et des actualités de chacun. Je cherche à mettre en avant : la démarche, le processus de création et la personnalité de chaque artiste, en y ajoutant des images de la création d’une œuvre dans la rue, qui est le 2ème point central de chaque portrait.

Bien évidemment, chaque artiste étant différent et certaines questions marchent mieux que d’autres selon la personne à qui je m’adresse. Pour donner un exemple, au début je demandais aux artistes de définir leur travail en 5 mots. Mais la plupart du temps, c’était une question auxquels ils avaient beaucoup de mal à répondre. J’ai donc arrêté de la poser.

Quand arrive la phase de montage, Stéphanie (ma monteuse) et moi ciblons ce qui nous parait le plus important dans l’interview pour comprendre le travail et la personnalité. C’est là que s’exprime ma subjectivité de réalisatrice. C’est un moment plein de surprises car je redécouvre très souvent des choses que je n’avais pas saisies au tournage. Et les artistes sont passionnants donc c’est vraiment une étape de travail très chouette !

Quel est le message que vous voulez faire passer par ce mode de portraits intimistes.

JEANNE-MARIE LAURENT : Aujourd’hui, le street art est très médiatisé. Le grand public est de plus en plus sollicité autour de ce sujet et l’approche qu’on en a s’est fortement démocratisé. Mais à bien y regarder, on parle toujours des mêmes, une poignée d’une dizaine d’artistes, et ce sont régulièrement ceux-là qui sont mis en avant dans les médias. Petites Chroniques Urbaines est apparu comme une évidence pour moi comme une manière de donner la parole à tous les autres artistes, talentueux, qui n’ont pas toujours l’opportunité de parler de leur travail comme ils le voudraient. En toute modestie, le projet propose de mettre en lumière des artistes qui méritent qu’on s’intéresse à leur art.

Comment réagissent les artistes après chaque portrait ?

JEANNE-MARIE LAURENT :  Je ne montre pas les portraits aux artistes avant de les mettre en ligne. Les artistes, je l’espère, me font suffisamment confiance pour savoir que je ne déformerai pas leurs propos et respecterai leur travail et leur personne.

Mambo a été très touché par le portrait que nous avons dressé de lui et m’a envoyé un super mail à la suite de la diffusion ! Ça m’a fait chaud au cœur car le retour des artistes est très important pour moi. Mademoiselle Maurice est déjà très enthousiaste et je pense qu’elle ne sera pas déçue par son portrait, qui devrait sortir en juillet !

Comment est financé le projet ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Pour le moment, le projet est financé grâce à mes petites économies ! C’est pour cela que je ne suis pas en mesure de payer mon équipe, comme je le disais précédemment … Bien évidemment, j’aimerai réussir à trouver une société de production afin de financer le film sur du long terme. Depuis la mise en ligne du site et la diffusion du portrait de Mambo, nous avons une belle vitrine à montrer aux gens, donc j’espère que cela pourra attirer d’éventuels partenaires financiers ! Actuellement, Raphael, notre chargé de production, nouvellement arrivé dans l’équipe, commence à démarcher afin de pouvoir trouver des mécènes et pourquoi pas même LA société de production !

Est ce qu’une date est déjà prévue…ou désirée ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Rien n’est fixé pour le moment, ce sera la surprise 😉

Est ce que cela donne des idées pour un nouveau documentaire ?

JEANNE-MARIE LAURENT : Le street art est un sujet tellement vaste que je sais que d’autres documentaires pourraient être tournés sur ce thème, à aborder sous d’autres angles avec de nouveaux points de vue… Je n’y réfléchis pas vraiment parce que Petites Chroniques Urbaines est un projet qui vient de naître et que j’aimerai faire vivre sur la durée. Mais je ne peux m’empêcher de réfléchir à d’autres idées autour du graffiti, de la culture hip-hop (qui m’attire beaucoup maintenant) … Je n’ai rien fixé car je sais que ma carrière et mon parcours de vie me réservent encore bien des surprises…

 

Site du documentaire  » Petites chroniques urbaines  » : http://petiteschroniquesurbaines.com/

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